Lost in transition
Rien ne bruisse ; la catastrophe est tapie dans l'ombre. J'ignore d'où me vient cette intuition, mais je sais que quelque chose de monstrueux se profile, qui va fondre sur moi comme le fauve sur le martyr. Pourtant je ne puis que rester là, bouche bée, prise dans une grosse gangue de gelée collante.
Je reconnais le goût acide de la peur sous ma langue ; je devine sa griffe glacée sur mon échine. Elle a posé ses mains lourdes sur ma poitrine et pèse de tout son poids, à contre-rythme de ma respiration. Recroquevillée, la tête entre les genoux, j'essaye de deviner, malgré le voile cotonneux de la terreur, quel pan de ma vie s'effondrera en premier.
Dans ma tête règne le silence opressant du champs de bataille avant l'assaut. Je sais déjà que les coups vont pleuvoir comme à Gravelotte et je me demande ce que je redoute le plus, de cette angoissante phase de transition ou de la violence de l'attaque qui suivra.
Des bises
Marie